jeudi 25 décembre 2014

Le point sur mes recherches

Tout d’abord, je n’avais pas de programme précis. Pourtant, devant la difficulté croissante à trouver de nouveaux éléments dans les archives en ligne, je me suis décidée à aller consulter les archives départementales sur place. Pour commencer, fin janvier, je me suis rendue aux archives départementales de la Seine Saint Denis, à Bobigny. 

Les AD de la Seine-Saint-Denis

Il y avait très peu de monde en salle de lecture. Le personnel était très aimable et coopératif. On m’a fait une carte de lecteur et j’ai mis mes affaires dans un casier. J’ai commandé sur une fiche, en indiquant leur cote, les listes électorales de Noisy-le-Grand et… 5 minutes plus tard, j’avais de gros cartons à ma disposition ! Je n’ai pas appris grand-chose, sauf l’adresse de mon grand-père, de mon arrière-grand-père et de mon grand-oncle en 1909, 1914, 1920, 1930 et 1939. Cela me sera utile pour retracer leur ligne de vie, avec leurs déménagements.

Listes électorales de Noisy-le-Grand (AD de Seine-Saint-Denis)

Puis, j’ai consulté le tableau de recensement de la classe 1916, dans lequel j’ai trouvé la fiche de mon grand-père André Léon Mouton, que je n’ai pas connu car il est mort en 1938, à l’âge de 42 ans. J’y ai appris qu’il avait les cheveux bruns et les yeux gris (comme mon père), choses qu’on ne voit pas sur les photos d’époque sépia ou en noir et blanc. Il avait un degré d’instruction de 3 (savait lire, écrire et compter, niveau fin d’études primaires). Il savait monter à cheval, conduire et soigner les chevaux et faire du vélocipède. Il avait obtenu des prix de tir et de gymnastique, mais il ne possédait pas le brevet de conducteur d’automobile. Il a dû le passer plus tard, car il est devenu ensuite « machiniste » d’autobus à la S.T.C.R.P. (Société des Transports en Commun de la Région Parisienne), l'ancêtre de la R.A.T.P. Je n’avais pas fait de grandes découvertes, mais j’étais satisfaite de ma première journée aux archives !

Le 4 février, je suis allée aux archives départementales des Hauts de Seine, à Nanterre. 

Les AD des Hauts de Seine

J’ai demandé à consulter les listes électorales de Gennevilliers, où est décédé mon arrière-arrière-grand-père Nicolas Mouton. Première consultation : juin 1871. Nicolas Marie Mouton n’était pas inscrit. Petite déception. Rien non plus dans les communes voisines (Asnières, Colombes, Courbevoie, Nanterre, Puteaux et Suresnes). Deuxième registre : octobre 1871. Rien non plus. Nicolas Mouton n’était donc pas allé tout de suite à Gennevilliers après sa disparition de son dernier domicile. Je voulais consulter les recensements de population entre 1870 et 1887 à Gennevilliers mais, curieusement, contrairement à la Seine et Marne, il n’y en a pas. Ma visite s’est donc révélée décevante.

Le 7 février, je suis allée aux Archives de Paris, boulevard Sérurier. J’y cherchais l’adresse du frère d’Hermine Granday, Armand Granday, cuisinier. J’ai trouvé dans le Bottin de Paris, de 1854 à 1862, un certain Granday (pas de prénom), limonadier au 280, rue St Martin. Ce pourrait bien être lui, car il s’est marié en 1861 avec une jeune fille qui habitait rue de la Michodière, dans le 2ème arrondissement. En 1863, il n’était plus là. Où s’était-il installé ?

Le 11 février, je suis allée aux Archives diplomatiques de La Courneuve. En effet, j’avais entendu dire par mon père que « les Granday étaient partis aux Etats-Unis pour y faire de la soupe à la tortue ». J’espérais y retrouver leurs traces. Le bâtiment tout neuf ressemble un peu à une prison. L’entrée est décourageante. Il y a d’abord un sas comme dans les banques : « appuyez », « attendez », « entrez », puis la fouille des bagages, comme à l’aéroport, et enfin un employé derrière une épaisse paroi vitrée qui vous demande vos papiers… Ensuite on traverse une grande cour, on passe encore deux portes et on arrive à l’accueil, à gauche, où on vous redemande votre carte d’identité. Prise de photo sur-le-champ et enfin on me délivre une carte et un badge avec une clé pour le vestiaire.  

Les archives diplomatiques de La Courneuve

A l’accueil de la salle de lecture, on m’oriente vers la salle des inventaires où, après une petite attente, l’archiviste écoute mon histoire. S’ils sont devenus américains, comme je le pense, pour pouvoir exercer leur activité aux Etats-Unis, ils ne sont pas immatriculés au consulat de France et on ne les trouvera pas ici. Elle me conduit néanmoins vers sa collègue qui a les inventaires des archives diplomatiques de Nantes sur son ordinateur. Elle cherche les noms de Granday et de Mouton, mais rien ! Ce n’est pas la bonne piste. Il faudrait, me dit-elle, contacter l’ambassade des Etats-Unis à Paris ou prendre un généalogiste professionnel… Pas question ! Je ferai mes recherches moi-même, et tant pis si cela prend davantage de temps. Tout le plaisir réside dans la recherche, pas dans le résultat !

J’avais déjà une petite collection de cartes d’archives. J’ai décidé de faire une pause pour mettre au clair ce que j’avais trouvé et ce que je cherchais encore.  

Et je me suis posé les questions :
- qu’est-ce que la généalogie pour moi ?
- quel but est-ce que je veux atteindre ?
- comment m’y prendre ?

La généalogie, pour moi, c’est reconstituer autant que possible la chaîne des générations, pas seulement des noms et des dates, mais aussi la vie des gens, leur métier, leur village, leur parcours sur l’échelle sociale. Le but que je vise est d’écrire un ouvrage illustré, je ne sais pas encore sous quelle forme, à mi-chemin entre l’histoire et le roman, avec pour personnages mes ancêtres.
Comment m’y prendre ? J’essaierai de compléter mes branches maternelles que j’ai fortement négligées, bien à tort. Je lirai plus en détail les registres, à la recherche d’éléments historiques ou d’événements locaux.

Grâce aux blogs d’amis généalogistes plus chevronnés, j’ai trouvé de bons exemples, des trucs, des conseils. Je pense qu’ils vont m’aider à progresser l’année prochaine. Voilà mes projets pour 2015.

jeudi 18 décembre 2014

Un blocage

Je voudrais tenter de retracer la trame de la vie de Nicolas Marie MOUTON (qui n'est peut-être pas réellement mon arrière-arrière-grand-père, mais ça ne fait rien !). C'est un personnage insaisissable. Il est né le 21 janvier 1823 aux Ecrennes (Seine et Marne), fils d’Antoine Edme MOUTON, charron, et de Marie Anne Elisabeth LEFRANC. Il est le cinquième d’une famille de huit enfants. Son frère aîné, Isidore Antoine Edme est devenu charron, comme son père, à Maincy. Ce village se trouve juste à côté du château de Vaux-le-Vicomte… et j’imagine qu’il a peut-être fabriqué ou réparé certaines roues des carrosses qu’on peut voir au Musée des équipages, dans une partie des anciennes écuries du château. Son frère cadet, Bazile Adolphe, est aussi devenu charron et a pris la succession de son père dans son village natal des Ecrennes. Son plus jeune frère, Charles, est devenu « conducteur de voitures ».


Une voiture, au musée des attelages de Vaux-le-Vicomte
(collection personnelle)

Mais revenons à mon arrière-arrière-grand-père Nicolas Marie MOUTON. Comme je continuais, avec patience, mais sans conviction, à feuilleter (virtuellement) les registres de recensement, à la recherche de personnes de ma famille, je suis tombée par hasard, en 1856, à Roissy, dans le canton de Tournan, sur "Nicolas MOUTON, 32 ans, charron, chef de ménage". Seul ! Adresse : Les Friches, à Roissy. C'était un renseignement précieux. Il s'était donc marié avant 1856, mais déjà il ne vivait plus avec sa femme. J'ai cherché dans le recensement suivant, en 1861. Malheureusement, Nicolas MOUTON avait déménagé. 

Où était-il donc allé ? Sur l’acte de mariage de mon arrière-grand-père Marie Nicolas MOUTON, le 24 août 1895, quelques lignes confirment que son père a disparu : "Le susdit MOUTON Nicolas Marie, père du futur, disparu de son dernier domicile dans le courant de l’année mil huit cent soixante ? (illisible) sans avoir donné de ses nouvelles depuis cette époque, ainsi que l’atteste l’acte de notoriété d’absence délivré sur papier libre le onze juillet mil huit cent quatre vingt quinze par Monsieur le Greffier de la Justice de Paix du canton de Mormant et dûment enregistré le lendemain pour servir au mariage d (illisible)...


"Les réservistes 1870" par Pierre-Georges Jeanniot
(wikimedia.org/wikipedia/commons)

Mais quelques années plus tard, le 31 janvier 1901, sur l'acte de mariage de son frère Charles Alexandre, âgé de 26 ans, garçon boulanger, une partie du voile se lève : j’apprends que son père, MOUTON Marie Nicolas (l’ordre des prénoms est inversé) est décédé à Gennevilliers, arrondissement de Saint-Denis (Seine) le 26 septembre 1887, âgé de 64 ans. Ainsi, mon arrière-arrière-grand-père est décédé à Gennevilliers ? Qu’était-il allé faire là-bas ? Le mystère s’épaissit. Pour l’instant, je ne trouve pas d’explication logique. Une supposition, toutefois, vu la date de la naissance de son fils, le 12 novembre 1870 : la guerre franco-prussienne. Selon mes calculs, Nicolas Marie MOUTON, qui se faisait appeler Nicolas tout court (d’après la déclaration de décès, faite par un voisin), aurait eu à l’époque 47 ans. Était-il encore dans l’armée de réserve ? S’était-il enfui pour échapper aux combats ? Est-ce qu’il venait de se marier ? Était-ce un second mariage ? Cela fait beaucoup de questions sans réponses.

Pourtant, après une période de découragement, j’ai repris mes recherches dans une autre direction. Et, comme cela arrive souvent, c'est en m'intéressant à un cousin d'Armand GRANDAY, Hippolyte LECUYER, sur la commune d'Aubepierre, canton de Mormant, qu'en regardant les tables décennales de ce village entre 1843 et 1852 je suis tombée sur le mariage de Nicolas Marie MOUTON avec Léonie Victorine Hermine GRANDAY (les prénoms sont inversés) le 21 mai 1850 à Aubepierre. C'est là qu'habitait Hermine, chez ses parents. Cela faisait trois ans que je cherchais cet acte. J'avais demandé de l'aide partout, en vain. Pourtant, j'aurais pu le trouver moi-même. J'avais laissé passer un indice : dans les recensements de 1846, j'avais noté qu'Hermine, 15 ans, habitait à Aubepierre chez ses parents.

Voilà ! J'ai donc les actes de naissance, de mariage et de décès de mon ancêtre. Mais cela ne me suffit pas. Je sais qu'il a disparu vers 1870, à la naissance du premier enfant de sa femme. Pour aller où ? Pour faire quoi ? A-t-il été condamné ? L'enquête continue...


jeudi 11 décembre 2014

Des débuts semés d'embûches (2)

Alors que j’envisageais de me lancer dans la lecture un peu fastidieuse des recensements, un jour, coup de théâtre, ma mère me raconte un souvenir qui lui était revenu à la mémoire. La grand-mère Anna (mon arrière-grand-mère, la femme de Marie Nicolas Mouton, dit Léon) lui avait dit à plusieurs reprises : « On ne devrait pas s’appeler Mouton, mais Naud ». Pourquoi ? Voilà qui changeait tout. Et qui était le mystérieux Monsieur Naud ?

Quelques semaines plus tard, mon père me fournit un nouvel indice. Il se souvenait du « père Naud » (sans jeu de mots), qui était marié avec « la vieille Blanche ». Ils avaient une maison à Pontault-Combault et il était allé les voir, quand il était petit, avec sa grand-mère Anna. J’avais donc une nouvelle piste…

Cependant, j’hésitais à aborder les gros registres de recensements, qui me faisaient un peu peur. J’ai commencé par chercher dans les tables décennales l’acte de mariage de Nicolas Marie Mouton avec Hermine Victorine Léonie Granday. Cet acte était introuvable ! Ni dans la commune de naissance d’Hermine (Fontenay-Trésigny), ni à Verneuil-l’Etang, où sont nés ses enfants, ni à Pontault-Combault, dont m’avait parlé mon père. Où et quand ces deux-là s’étaient-ils bien mariés ?

A la naissance de mon arrière-grand-père Marie Nicolas Mouton (dit Léon), en 1870, sa mère avait 39 ans. Était-ce vraiment son premier enfant ? Était-ce son premier mariage ? Autant de questions sans réponse.

J’ai donc fini par me résoudre à consulter les recensements. Les gens sont recensés par canton et, à l’intérieur de chaque canton, par ville ou village. Les noms n’étaient pas par ordre alphabétique. Il fallait lire toutes les pages, ligne par ligne, rue par rue. Cela m’a pris beaucoup de temps. Certains soirs, j’en avais mal aux yeux, à force de lire les noms sur l’écran de mon ordinateur. La première personne que j’ai trouvée, en 1841, dans le canton du Châtelet, c’est mon arrière-arrière-grand-père Nicolas Marie Mouton (18 ans) chez ses parents, dans son village natal des Ecrennes. Le village comptait 364 habitants. Mais en 1846, lors du recensement suivant, Nicolas n’était plus là. Il avait dû partir au service militaire. Le service durait 7 ans, à l’époque, si on ne pouvait pas se faire remplacer.

A la même époque (en 1846), dans le canton de Mormant, vivait chez ses parents, à Aubepierre, Hermine Victorine Léonie Granday (15 ans) et son frère Armand (13 ans). Où, quand et comment Nicolas et Hermine s’étaient-ils rencontrés ?

Grâce à l'indice fourni par mon père, j'ai regardé à Pontault-Combault, canton de Tournan. En 1846, j’y ai trouvé plusieurs familles NAU. Était-ce dans l'une de ces familles que vivait l’« ami » d’Hermine Granday ?

En 1851, à Aubepierre, Hermine (20 ans) n’habitait plus chez ses parents. Son frère Armand (18 ans) non plus. Où étaient-ils ? Où les chercher ?

Soudain, j’ai eu une idée un peu farfelue. Sautant 40 ans, j’ai cherché dans les recensements de 1891 et – ô surprise ! – j’ai trouvé à Pontault-Combault, rue du Château-Gaillard, une étrange famille :

Recensement de 1891 à Pontault-Combault, canton de Tournan
(Seine et Marne)

Nau Louis, 49 ans, journalier, chef de ménage
Granday Léonie, 49 ans, couturière, épouse
Mouton Léon, 21 ans, maçon, fils de l’épouse
Mouton Louis, 19 ans, domestique, fils de l’épouse
Mouton Charles, 17 ans, jardinier, fils de l’épouse
Granday Hermine, 78 ans, sans profession, aïeule

Voilà ! Ils étaient tous là ! Il y avait cependant quelques erreurs. Léonie (Hermine Victorine) n’avait pas 49 ans, mais 59 ans. Et on appelait déjà Marie Nicolas de son surnom « Léon ». Mais le mystérieux compagnon d’Hermine était bien Louis Nau !

Procédant à reculons, j’ai retrouvé la famille Nau en 1886 à Pontault-Combault. Cette fois, Louis Nau avait carrément déclaré les enfants comme les siens :
Nau Jean-Baptiste [1] 43 ans, manouvrier, chef de ménage
Granday Léonie, 53 ans, couturière, son épouse
Nau Léon Octave[2] 16 ans, leur fils
Nau Louis Marie, 14 ans, leur fils
Nau Charles, 12 ans, leur fils
Granday Hermine, 73 ans, aïeule.

En 1881, à Pontault-Combault :
Nau Louis Jean Baptiste, 39 ans, manouvrier
Granday Léonie Victorine, 50 ans, manouvrière
Nau Louis Marie, 10 ans
Nau Charles Alexandre, 8 ans
Tiens ? le fils aîné Marie Nicolas Léon Octave n’était pas là ?

En 1876, ils n’habitaient pas encore à Pontault-Combault. C’est à Verneuil-l’Etang, canton de Mormant, rue de Pecqueux, que commence l’histoire…
Granday Louise Victorine, femme Mouton, journalière, 44 ans, née à Fontenay
Mouton Marie Nicolas, son fils, 6 ans, né à Verneuil
Mouton Louis Marie, son fils, 4 ans
Mouton  Charles Alexandre, son fils, 2 ans
Neau[3] Louis, manouvrier, 33 ans, né à Pontault (Seine et Marne).

Je suis donc revenue en 1881 à Verneuil-l’Etang et j’y ai retrouvé mon arrière-grand-père. Il habitait avec sa grand-mère :
Gandouin Hermine, 68 ans
Granday Léon, 11 ans, le petit-fils.

Alors, qui est le père des enfants ?

Jusqu’ici, je voulais croire que Marie Nicolas, vu son prénom, était probablement le fils de Nicolas Marie Mouton, le mari d’Hermine Victorine Léonie Granday. La coutume voulait qu’on donne au fils aîné le même prénom que son père. Mais après avoir lu tous ces recensements, avec les changements de nom successifs de mon arrière-grand-père, et surtout en me rappelant la réflexion de mon arrière-grand-mère Anna à ma mère : « On ne devrait pas s’appeler Mouton, mais Naud », je dois me résigner à conclure que j’ai suivi une fausse piste. Par le sang, nous ne sommes pas des Mouton, mais d’après la loi, Hermine n’étant pas divorcée ni veuve, ses enfants étaient automatiquement réputés nés de son mari. Louis Nau, même s’il était réellement le père, ne pouvait pas en réclamer la paternité. Le second enfant, qui se prénomme Louis, vient corroborer cette thèse.

Il reste encore plusieurs questions sans réponse. La date et le lieu de mariage de Nicolas Mouton et d'Hermine Granday (elle, c'est sûr, c'est bien mon arrière-arrière-grand-mère !). Etait-ce un deuxième mariage ? Qu'est devenu Nicolas Mouton ? La saga continue. 






[1] J’ai vérifié : il s’appelait Louis Jean Baptiste Nau.
[2] C’est mon arrière-grand-père Marie Nicolas Mouton ! Il fallait le savoir !
[3] Ce n’est pas une faute. L’orthographe de son nom variait suivant le scribe.

jeudi 4 décembre 2014

Des débuts semés d'embûches (1)

Il y a 4 ans, quand j’ai commencé ma généalogie, je suis partie tête baissée sur ma branche paternelle (lignée agnatique), puisque c’était en France, jusqu’à très récemment, le père qui donnait son nom à la famille. Je ne le savais pas encore, mais ce n’était pas une bonne idée.

Au début, j’ai trouvé ça facile. Mes ancêtres étaient restés en Seine et Marne depuis plusieurs générations et ce département a mis en ligne tous les actes d’état-civil. J’ai donc pu remonter sans trop de difficultés jusqu’à mon arrière-grand-père Marie Nicolas Mouton. C’était très encourageant. Ma méthode était rudimentaire. Je notais à la main le résultat de mes recherches sur un petit cahier (oui, oui, ne riez pas !).

Puis je me suis décidée à taper tous les actes que j’avais trouvés et à les classer dans un dossier par ordre chronologique sur mon ordinateur. Par précaution, j’ai imprimé sur papier ces mêmes documents et je les ai rangés dans un dossier Exacompta.

^Baptême de Nicolas Mouton le 10 mars 1682 à Ozouer-le-Voulgis
AD de Seine-et-Marne, 5MI5380 (vue 32)

Je me suis inscrite sur Geneanet. J’ai commencé à rentrer les noms et les dates des événements (naissance, mariage et décès) des membres de ma famille. Cela m’a permis de visualiser mon arbre, encore peu fourni.

C’est à ce moment-là que j’ai pris conscience de mon absence de méthode. En matière de généalogie, il faut être précis et rigoureux. Avec un logiciel spécial, ce serait peut-être plus facile ? J’ai acheté Heredis.

Comme le nombre de personnes de mon arbre augmentait et que je commençais à avoir du mal à m’y retrouver, j’ai inventé un tableau sur Excel pour noter et imprimer, à chaque génération, le père, la mère et tous leurs enfants. Je m’obstinais avec mon arbre ascendant agnatique… Je suivais toujours les pères, négligeant les branches maternelles. Pourtant, comme dit le dicton latin : « mater semper certa est, sed pater incertus ». On connaît avec certitude la mère (sauf cas de tricherie), mais il est difficile de prouver qui est le père (à cette époque, on ne connaissait pas l’ADN).


Ascendance de mon arrière-arrière-grand-père Nicolas Marie Mouton


C’est ainsi que je me suis cassé le nez dans ma recherche en arrivant à mon arrière-arrière-grand-père Nicolas Marie Mouton. Mais je n’ai pas compris tout de suite. J’ai encore remonté la lignée sur six générations, et j’étais très fière d’avoir trouvé un ancêtre, Nicolas Mouton, né en 1682 à Ozouer-le-Voulgis (Seine et Marne).

Mais est-il vraiment mon ancêtre ?
C’est une question de nom.

En relisant plus attentivement l’acte de naissance de mon arrière-grand-père, Marie Nicolas Mouton, le 12 novembre 1870 à Verneuil l’Etang, j’ai découvert que la déclaration avait été faite, de manière inhabituelle, par son grand-père maternel, Christophe Désiré Granday. L’enfant était né chez un certain Antoine Chevallier, dont on ne sait rien, et qui n’est pas de la famille, apparemment. La mère, Hermine Victorine Léonie Granday, avait 39 ans et le père, Nicolas Marie Mouton, domestique, âgé de 49 ans était absent, son domicile inconnu.

J’ai d’abord pensé que mon arrière-arrière-grand-père était allé chercher du travail dans une autre commune ou même dans une autre région, faute de trouver un emploi sur place. Cela se faisait couramment à l’époque. Mais s’il était vraiment parti travailler ailleurs pour nourrir sa famille, sa femme aurait su son adresse ! Alors je me suis dit que le bonhomme, un gagne-petit, effrayé par ses responsabilités de père qu’il ne pouvait pas assumer, avait quitté sa femme, quand elle s’était trouvée enceinte, et s’était volatilisé. Ou bien que le couple ne s’entendait pas bien et qu’il était parti.

En effet, deux ans plus tard, le 20 juin 1872, naissait à Verneuil l’Etang un second enfant, Louis Marie, déclaré cette fois par la sage-femme (j’ai su plus tard que le grand-père Christophe Désiré Granday était décédé le 3 février de la même année), « né de Hermine Victorine Léonie Granday, sans profession, âgée de 41 ans, domiciliée dans cette commune, épouse de Marie Nicolas Mouton, domestique, âgé de 51 ans, absent de cette commune et dont le domicile est inconnu »

Cette deuxième naissance confirmait ma seconde hypothèse. A moins d’imaginer que Nicolas Marie Mouton revenait chaque année en catimini faire un enfant à sa femme pour disparaître à nouveau ensuite, il fallait bien se rendre à l’évidence : Hermine Granday devait avoir un amant ! J’en ai eu l’intime conviction lorsque, deux ans plus tard, naissait un troisième enfant, Charles-Alexandre. Le père était toujours absent. Il me restait à trouver des preuves. Qui était l'amant ? Je me suis donc lancée dans une gigantesque battue dans les recensements de la Seine et Marne… (à suivre)