Mon grand-père paternel, André Léon
MOUTON, que je n’ai pas connu, est né le 3 mai 1896 à Villiers sur Marne (actuel
Val de Marne). Il était le fils de Marie Nicolas MOUTON (dit Léon) – je n’ai
jamais su la raison de ces changements de prénoms, fréquents à l’époque,
puisque mon grand-père maternel, lui aussi, qui se prénommait officiellement
Marcel Alfred, se faisait appeler (ou on l’avait surnommé) Maurice – et de
Henriette Anna Garnier,
couturière. A l’origine, André était maçon, comme son père. Mais, confronté au
manque d’opportunités en temps de crise dans le bâtiment, il est entré à la
STCRP (Société des Transports en Commun de la Région Parisienne, l’ancêtre de
la RATP (Régie Autonome des Transports Parisiens) où il est devenu conducteur
d’autobus (on disait « machiniste »). C’était un métier bien
différent de celui des conducteurs d’autobus d’aujourd’hui. Les moteurs
crachaient leurs gaz d’échappement en hauteur, au niveau du machiniste, il n’y
avait pas de direction assistée, et il fallait effectuer un double débrayage
(en repassant au point mort à chaque fois) pour passer les vitesses…
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Mon grand-père André Mouton |
Quand la guerre éclate, mon grand-père
a 18 ans. Inscrit sous le numéro 226 de la liste du canton du Raincy, il est
incorporé le 12 avril 1915 et arrive au corps le lendemain. Il est en
formation, j’imagine, jusqu’au 13 juillet 1915 dans une U.N.C. (unité non
combattante). Le 16 mars 1916, il passe dans le 19ème bataillon de
chasseurs à pied. Puis il est envoyé aux armées (unité combattante) le 14
juillet 1916. Il est blessé le 27 septembre 1916 à Bouchavesnes-Bergen, dans la
Somme (plaie au bras gauche par éclat d’obus). Il est alors hospitalisé et
affecté à l’intérieur (dépôt). Il est à nouveau hospitalisé pour sa
rééducation du 18 mai au 14 août 1917.
Le 6 septembre 1917, il est classé service auxiliaire par la commission de
réforme d’Alençon pour : « limitation
des mouvements d’extension du coude gauche ankylosé » (blessure de
guerre). Le 20 mars 1918, il passe au 104ème régiment
d’infanterie, et le 5 juillet 1918 à nouveau au 19ème bataillon de
chasseurs à pied. Il est maintenu dans le service auxiliaire apte au front par
la commission de réforme de Chartres du 5 août 1918 pour « limitation des mouvements d’extension du coude gauche suite de
rétractation tendineuse, paralysie incomplète du radial ». Il est mis
en congé illimité de démobilisation 6ème échelon le 4 avril 1919.
Ce que ne précise pas sa fiche
militaire, je l’ai trouvé dans les Journaux de Marche et Opérations sur le site
Mémoire des Hommes. Mon grand-père a participé à la bataille de la Somme qui se
prépare dès le 14 septembre 1916 au camp 55, dans les bois, près de Cérizy-Gailly.
Le 18, on conduit les hommes du 19ème bataillon de chasseurs à pied,
en auto, à Suzanne, où ils débarquent dans l’eau et la boue. Le soir, en
passant par Curlu, ils gagnent les carrières de Tatoï, au nord de Hem. Puis
dans la nuit du 20 au 21, ils entrent en ligne à Bouchavesnes et la ferme de
Bois Labbé. Sur ce champ de bataille, les mouvements sont rendus difficiles par
la pluie, la boue, l’état des sols. En outre, l’ennemi possède d’excellents
observatoires au mont Saint-Quentin, ce qui limite les mouvements, car les
chemins sont constamment battus par le canon ennemi jusqu’à des distances
considérables du front de combat. Après quelques jours en 2ème ligne
à la tranchée de Hanovre, le 19ème bataillon revient à
Bouchavesnes-Bois Labbé dans la nuit du 27 au 28. La carrière de Bouchavesnes,
P.C. du bataillon et centre des réserves, est un nid à obus. C’est là que mon
grand-père a été blessé.
Le 19 juillet 1919, la guerre finie,
André Léon MOUTON épouse Henriette
Marie Châtelain, couturière, et
le 3 novembre de la même année (c’est un peu court, comme période de gestation,
il me semble) sa femme accouche (prématurément) de deux enfants
(jumeaux) : Argentine Anna (ma tante et marraine) et Marcel André (mon
père). A ce propos, je viens d’apprendre récemment par la télévision que le premier né des
jumeaux n’est pas, contrairement à ce que l'on croit, l’aîné, mais le puîné,
car l'aîné, ayant été conçu en premier, est au fond de l’utérus. Ainsi, mon père, né
après sa sœur, était sans doute l’aîné. Il ne s’en doutait pas.
Ce que j’ignore aussi, c’est où et comment
mon grand-père a rencontré ma grand-mère. A la faveur de la guerre, je suppose.
Après la bataille de la Somme, au cours de laquelle il a été blessé, il a été
hospitalisé. En fonction des places dans les hôpitaux, on a très
bien pu l’envoyer dans la Marne. Or, ma grand-mère est champenoise… Mais
comment retrouver ces détails ? Je vais tenter d’écrire au service des
archives médicales et hospitalières des armées (SAMHA) à Limoges.
Finalement, mon grand-père a eu de la
chance. Il a échappé (presque) indemne au grand carnage de la guerre de 14-18. Hélas, il
est décédé d’un cancer le 13 août 1938 à Noisy le Grand. Il n’avait que 42 ans…
Encore un beau billet Nicole :).
RépondreSupprimerDe quel coin de la Marne était originaire ta grand-mère? C'est chez moi !
Ma grand-mère est née près de Vertus, à Villeneuve-Renneville-Chevigny. C'était à Chevigny, les communes n'étant pas encore regroupées. Ta famille est de la région ?
SupprimerBonjour,
RépondreSupprimerBelle article d'un poilu de la Grande Guerre . Par rapport aux différents prénoms (que vous avez citez au début de l'article), nos ancêtres n'ont pas changeaient de prénoms, en réalité on donnaient un ou plusieurs prénoms à la naissance (à l'Etat Civil) , généralement le prénom du parrain ou de la marraine, ou bien d'un membre de la famille, ou d'un "saint" par exemple. Mais généralement on les appelaient différemment, on leurs donnaient un prénom ou un surnom. C'est le cas dans beaucoup de familles de l'époque !
Merci pour ce beau billet ;)
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