Cette fois-ci, je vais essayer de
faire le portrait d’un poilu que je ne connais pas. Un jour, j’ai reçu un coup
de téléphone d’une personne membre d’une association de généalogie qui recensait tous les
noms des poilus inscrits sur le monument aux morts de sa commune. Elle avait
trouvé sur geneanet le nom d’un de ces poilus sur mon arbre et elle voulait
savoir si j’avais une photo de lui. Hélas, non, car c’est un parent assez
éloigné. En revanche, elle m’a fourni un renseignement que je ne possédais
pas : il figurait sur le monument aux morts de Pontault-Combault (Seine et
Marne). Il était « Mort pour la France ». Ainsi a commencé mon
enquête.
Le monument aux morts de Pontault-Combault |
Roger Henri LADOUET est né le 24 mai
1896 à Pontault-Combault (Seine et Marne). Il est le fils de Célestin LADOUET, 27 ans,
boulanger, et de Cécile Julie FLEURY, 22 ans. Les témoins à sa naissance
étaient Adolphe TOULLEC, 78 ans, rentier, et Augustin BAYOL, 30 ans, boucher.
Il avait un frère, Raoul Maurice
LADOUET, né un an plus tôt, le 28 janvier 1895 à Pontault-Combault également,
qui a eu pour témoins à sa naissance Louis BOURGEOIS, 46 ans, maçon, et
Alexandre BRANDIN, 44 ans, peintre en bâtiment. Il a survécu à la guerre et
s’est marié à Lésigny (Seine et Marne) avec Simone Augustine SOUTIN.
Célestin LADOUET, le père de notre
poilu, était le fils de Victor Isidore LADOUET, tuilier, et de Juliette
DEVILLARS, tous deux originaires du département de l’Yonne. Ils se sont
installés à Courtenay, dans le Loiret, et ont eu quatre enfants :
Célestin, Arthur, Juliette et Désiré.
Juliette LADOUET, née le 18 mai 1881 à
Courtenay (Loiret), a épousé Charles Alexandre MOUTON (enfin, voilà le lien !) le 30 janvier 1901 à Pontault-Combault.
Etaient témoins à leur mariage : Pierre Baptiste GUYOT, 45 ans,
manouvrier, et Marie Jean Louis MONNET, 29 ans, entrepreneur de maçonnerie,
demeurant tous deux à Verneuil-l’Etang (Seine et Marne). Charles Alexandre
MOUTON, boulanger, né le 27 mars 1874 à Verneuil-l’Etang, était le fils de
Marie Nicolas MOUTON, domestique, et de Hermine Victorine Léonie GRANDAY. Il
avait deux frères : Louis Marie MOUTON et Marie Nicolas MOUTON (dit Léon),
mon arrière-grand-père.
Revenons à Roger LADOUET, notre poilu.
On devait prononcer ladoué, si
j’en juge par les orthographes anciennes sur les actes de ses ancêtres. Roger a
donc passé son enfance dans la commune de Pontault-Combault, allant à l’école
communale, jouant et se disputant avec son frère Raoul, aidant peut-être ses parents à la boulangerie. Puis la guerre a éclaté. Il avait 18 ans.
Il a été mobilisé et affecté au 156e R.I. (régiment d’infanterie).
C’est lors de la bataille de la Somme
qu’il a perdu la vie « tué à l’ennemi » à Hardecourt au Bois (Somme)
le 2 juillet 1916.
Je n’ai
jamais joué aux petits soldats de plomb, mais en lisant le journal des marches
et opérations, j’ai l’impression que nos poilus étaient des pions que l’on
déplaçait suivant les besoins sur le champ de bataille.
Les objectifs
D’après l’historique du 156e
Régiment d’infanterie (qu’on appelle le quinze-six), la VIe armée,
encadrée au nord par la IVe armée britannique, devait prendre
l’offensive sur les deux rives de la Somme. Le 20e C.A. opérait au
nord de la Somme, avec deux D.I. Sa mission était de couvrir la droite de
l’armée anglaise et d’attaquer en liaison avec elle. La 39e D.I. avait
pour mission de couvrir l’attaque des Anglais sur Montauban. A cet effet, elle
devait enlever le bois d’En-Haut, le bois Sans-Nom et le bois Favière.
Le déroulement de l’attaque
La 77e attaque à gauche, le
15-6 à droite. Le 160e est maintenu en réserve. Le 15-6 mène
l’attaque, 2e bataillon à gauche, 1er bataillon à droite.
Les bataillons sont eux-mêmes sur quatre vagues ; chacun des bataillons de
première ligne fournit une compagnie de réserve de régiment (2e et 5e
compagnies). Le 3e bataillon est réserve de brigade. Les objectifs
sont : bois d’En-Haut, avec postes avancés vers la voie ferrée et la ferme
Klafham (1er bataillon) bois Sans-Nom et carrière du bois Sans-Nom
(2e bataillon).
Le 1er juillet à 7h 30,
l’attaque se déclenche. Le 2e bataillon atteint sans difficulté son
objectif. Le 1er bataillon engage une courte lutte dans le bois
d’En-Haut qu’il enlève à la grenade. A 8h 15, tous les objectifs sont atteints.
Le 3e bataillon franchit à son tour les lignes sous un barrage un
peu plus dense et vient se placer en réserve dans les anciennes tranchées
ennemies. Le régiment fait environ 300 prisonniers, dont un chef de bataillon.
Dans la journée, la réaction d’artillerie est plus sérieuse et provoque
quelques pertes. Les pertes totales de la journée sont de : 1 officier tué
(sous-lieutenant MOREL), 2 officiers blessés (lieutenant COEUILLET et
sous-lieutenant DEMARNE), soldats : 21 tués, 130 blessés.
Le 2 juillet, au cours de la nuit, le
bombardement devient intense. Vers 1h 30, une violente contre-attaque est
repoussée par les feux. A 4 heures, au petit jour, une nouvelle contre-attaque,
plus violente encore, se déclenche, mais les hommes sont tous à leurs postes et
l’attaque ne peut atteindre nos lignes. L’ennemi subit de lourdes pertes et
laisse 50 à 60 morts dont 4 officiers sur le front d’une seule section. Les
morts appartiennent au 156e, 63e, 6e, 38e
R.I. et 23e chasseurs à cheval. Le total des pertes du 2 juillet
s’élève à 39 tués et 73 blessés, dont 4 officiers (sous-lieutenants).
Roger Henri LADOUET faisait partie des 39 soldats tués. Il avait tout juste
vingt ans.
Toujours passionnants, souvent émouvants, tous ces échos de cette période, ces évocations de tous ces jeunes gens disparus avant d'avoir vécu
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